Théorème de la Décision


Au cours de mon expérience professionnelle, j’ai vu prendre un grand nombre de décisions sur les sujets les plus divers. Les bonnes décisions paraissent peu intéressantes de prime abord et d’ailleurs elles ne sont pas forcément identifiées comme telles, ce qui est bien dommage car il y aurait sans doute beaucoup de leçons à tirer de leur analyse approfondie. Les mauvaises décisions sont en revanche bien entendu largement commentées, souvent pour identifier un bouc émissaire qu’on adorera détester.

Bonnes ou mauvaises, les prises de décision semblent toutes obéir à une loi qui s’est confirmée à de nombreuses reprises. Cette loi est d’ailleurs justifiable par un raisonnement, ce qui en fait un théorème celui-ci s’énonce ainsi : « Plus une décision est importante, moins le processus de prise de décision est raisonné ».


Démonstration


Le théorème résulte à la fois d’un constat statistique et de grandes constantes de la psychologie humaine. Il peut être invalidé dans des situations particulières, mais prouve sa pertinence statistique dans la répétition incessante de ces effets déroutants.

Le constat statistique est que les décisions importantes sont rares et présentent souvent des caractéristiques et des conséquences en cascades propres qui rendent leur analyse épineuse : fallait-il sauver Lehman Brothers en 2008 ? Comment réagir de façon mesurée à un mouvement social inédit ? Fallait-il faire entrer la Grèce dans la zone Euro ?


A l’inverse, les décisions mineures sont souvent répétitives et analysées largement avec du recul. Ainsi pour valider un paiement électronique ou un crédit de petit montant disposera-t-on de larges bases de données, d’outils statistiques puissants et les procédures de décisions auront été calibrées avec soin. Ces multitudes de microdécisions seront prises de façon parfaitement raisonnée.


La psychologie humaine joue dans le même sens : le faible enjeu d’une petite décision fait que celui qui la prend n’est que modérément influencé. A l’inverse, pour une décision critique, les décideurs subiront une pression maximale réelle ou ressentie de façon totalement qualitative (« comment l’Histoire me jugera-t-elle », « serais-je réélu si je prends telle décision… »).

Cette pression est encore accrue par la dimension temporelle. En négociation, on constate ainsi bien souvent que les points essentiels sont évoqués en dernier dans les échanges alors que des points mineurs sont traités abondamment en début de réunion. Chaque acteur estime en effet qu’il se fragilise en pointant trop rapidement ses véritables enjeux.


Enfin la psychologie humaine joue un rôle fondamental dans la prise de décision par des responsables seuls ou peu nombreux qui veulent absolument montrer qu’ils savent par eux-mêmes. Faire appel à un tiers subordonné dans une prise de décision cruciale présente un risque pour son propre pouvoir. Ceci explique pourquoi des personnages inattendus peuvent être écoutés par des dirigeants : ils rassurent un dirigeant solitaire sans présenter le moindre risque politique tant qu’ils restent dans l’ombre. De nombreux dirigeants restent finalement très seuls face à ces décisions difficiles.


Conséquences


Notre « théorème de la décision » implique plusieurs constats révélateurs :


  • Tout d’abord, il n’implique pas que les décisions prises sont mauvaises quand elles sont importantes. Un dirigeant peut seul et sous la pression prendre un grand nombre de bonnes décisions. Il est certain qu’il vaut mieux pour cela qu’il soit sage, lucide, intuitif voire chanceux.


  • Ensuite, il importe de prendre en compte le théorème pour relativiser certains échecs : en situation de crise, le temps et le recul manquent alors que la décision embarque en général son cortège de conséquences difficiles à anticiper. Ce constat valide notamment le côté « visionnaire » de dirigeants qui ont su avoir raison contre leurs experts. Finalement le théorème humanise quelque peu le fonctionnement de l’entreprise en donnant des limites à un rationalisme utopique.


  • Enfin le théorème incite à un examen de certaines prises de décision et à un effort supplémentaire d’anticipation. Prendre des décisions rationnellement est un effort, n’est pas naturel dans les organisations humaines et suppose de pouvoir sortir de schémas simplistes, semblants logiques par habitude. Nous sommes fiers en tant d’experts d’assister nos clients dans leurs prises de décision pour tendre vers des choix plus pertinents et éviter de sombrer dans des comportements de troupeaux, de fascination ou de paralysie malheureusement si fréquents.



Les processus de décisions sont présents partout dans l’entreprise et prennent des formes très variées. Les améliorer est possible à condition d’être lucide sur ce qui peut et doit être fait. Ainsi se raccrocher à tout prix à une vision par processus sans prendre en compte les personnes est souvent une approche contreproductive. A l’inverse, se confier à l’expérience d’experts installés peut conduire à une sclérose préjudiciable. Ces constats sont illustrés largement dans des secteurs à fort enjeux multiples comme la gestion des hôpitaux (santé, moyens et budgets).

C’est pourquoi il est nécessaire de s’appuyer à la fois sur des compétences générales concernant les organisations et les enjeux métiers et également sur des expertises très techniques et analytiques pour faire face à ce défi. Il est aussi essentiel que les décideurs puissent compter sur une loyauté sans faille des acteurs pour oser toucher des éléments de décisions clés pour eux. S’appuyer sur les réussites est sans doute une bonne approche pour progresser sur les processus les moins raisonnés.


En tant qu’acteurs externes, nous nous tenons à votre disposition pour vous assister dans ce type de démarches à très forts enjeux cachés. Faites appel à nous : c’est une petite décision que vous ne regretterez pas !





Jean-Marc Govignon, Directeur de AJMG Expertise.
Email : jmgovignon@ajmg-exp.com
Téléphone : 06 88 07 93 65